Lucas... Epilogue possible

Dix ans plus tard ...

Cela faisait une bonne demi heure qu'il regardait ces deux femmes. Serrées l'une contre l'autre, elles se tenaient devant la sépulture d'un homme mort en héros lors d'une prise d'otage dont les journaux avaient parlé pendant des semaines. Ce jour là, le QG d'Interpol avait été pris d'assaut par des terroristes en proie à un désir de vengeance. Un dangereux parrain de la mafia y était retenu prisonnier, attendant d'être transféré dans une prison de haute sécurité. Les malfrats avaient cru pouvoir l'y assassiner. Leur opération fut un échec et ne pouvant fuir, ils avaient pris les policiers en otage. Très armés et dangereux, ils avaient tués plusieurs personnes, avant d'être neutralisés. Certains journalistes affirmèrent que l'agent décédé avait agit avec l'aide du chef de clan retenu prisonnier mais aucun n'avait pu le prouver. D'ailleurs, l'homme en question avait disparu dans la cohue qui avait suivie et depuis plus personne n'avait entendu parlé de lui. Devant la tombe, les deux femmes bougèrent, et il pu voir le ventre rebondi de la plus âgée. La blondinette à ces côtés semblait inquiète quand elle s'adressa à elle.
- Tu es sûre que tout va bien?
- Oui, c'est juste le bébé qui vient de me donner un coup de pied assez violent.
- Je ne te crois pas, tu n'es pas comme d'habitude. Plus pensive, moins volubile, ce n'est pas toi.
- C'est l'anniversaire de la mort de ton frère Maggie.
- Oui, je sais mais cette année, c'est différent, tu es différente.

Elle se tourna vers la jeune fille. Celle-ci avait aujourd'hui 18 ans et n'était plus une enfant. Elle était assez mûre pour comprendre. Comme elle l'avait fait des milliers de fois depuis le jour où Tom les avait présentées, elle lui replaça une mèche de cheveux derrière l'oreille.
- Cela fait cinq ans aujourd'hui, ma chérie. J'attendais Louis et j'en étais à peu prés au même stade que maintenant. Ce jour-là, c'était son dernier jour de travail avant ses congés paternité, comme il disait. Je devais rester à la maison et l'attendre mais au hasard d'un zapping télé, j'ai appris que Lucas était là bas. J'ai pris ma voiture et j'y suis allée. Si je ne l'avais pas fait, il serait encore en vie aujourd'hui.
- Pourquoi tu dis ça?
- Pour me faire sortir, il a ...( un sanglot dans la voix, la força à reprendre son souflle) Il a libéré Lucas et lui a demandé de m'emmener loin. Il n'a pas un seul instant voulu que Lucas ne lui vienne en aide. Sa seule préoccupation était de me faire sortir. Et quand un de ces types a vu Lucas, ton frère s'est mis entre la balle et lui. Il a tiré presque en même temps et l'a tué. Mais il est mort dans mes bras Maggie. Il est mort parce qu'il m'aimait trop, parce qu'au lieu de penser à sa propre sécurité, il a pensé à la mienne.
- Tu attendais son enfant !! Il n'y a rien qu'il n'aurait fait pour vous. Rien tu m'entends?
- Si j'étais restée à la maison ...
- Si tu étais restée à la maison, tu aurais vu ton mari mourir à la tv! Ces types étaient dingues Rose! Tom n'aurait pas agit autrement que ce qu'il a fait, parce qu'il avait ça dans le sang. Il croyait en ce qu'il faisait, il croyait en la justice.

Doucement, Maggie prit sa belle-soeur dans ses bras.
- Il t'aimait tant qu'il t'a laissé sous la protection de la seule personne qu'il savait digne de toi. Il t'a confiée à Lucas, mais pas que toi. Il nous a tous confié à lui, toi, moi, Louis. Ca n'a pas été facile, mais on est heureux maintenant. On forme une vraie famille, aujourd'hui. Et puis - elle posa la main sur le ventre tendu de Rose - bientôt on aura un véritable lien entre nous tous. On va avoir un petit frère.
- Il me manque Maggie, il me manque tant!
- Moi aussi …

L'homme qui les espionnait de loin, eut un sentiment de victoire quand une voiture aux vitres teintées s'avança. Un garçonnet en sorti précipitamment, suivi d'un homme de haute stature. Même de loin, on pouvait ressentir la puissance et le pouvoir qui se dégageait de Lucas Paoli. Le lion avait été touché en plein cœur quelques années plus tôt mais en était ressortit plus fort, plus mûr aussi. Chacune de ses décisions était aujourd'hui le fruit d'une intense réflexion. Il avait su s'entourer des meilleurs spécialistes du crime organisé et avait placé son épouse, ancien officier d'Interpol à la tête de la façade légale de son empire. Insaisissable jusqu'alors, il était devenu intouchable aujourd'hui.
Le petit garçon vint se blottir contre la femme enceinte qui lui caressa la tête.
- C'est là qu'il est mon papa ?
- Oui mon petit cœur. C'est ici qu'il repose.
- Et il est mort pour toujours ?
- Pour toujours – puis d'un voix étranglée- Mais avant de partir il m'a laissé le plus beau des cadeaux
- Moi !!! s'écria l'enfant

Lucas vint se placer aux côtés de sa femme qu'il enlaça. Bien qu'il fut certain de ses sentiments envers lui, il ne put réprimer une pointe de jalousie envers Tom. A ce moment, Rose tourna la tête vers lui et lui sourit.
-Tu n'aurais pas du venir, c'est dangereux pour toi.
- J'ai pensé que tu aurais eu besoin de soutien. Et puis, je suis sensé être en Belgique.
- La Belgique ? Pourquoi la Belgique ?
- Un pays que je n'ai jamais visité … Hey, souris-moi un peu s'il te plaît. Rose ?? Dis moi ce qui ne va pas.
- Jamais je n'aurais réussi à survivre à tout ça sans toi. Pas seulement parce que tu m'as sauvé ce jour là mais pour tout le reste aussi. Tu m'as redonné le goût de vivre et appris à aimer mon fils.
- Tout était au fond de toi mon ange, il te fallait juste du temps.

Se blottissant un peu plus contre son mari, elle repensa à ces dernières années. Jamais il n'avait manqué aux promesses qu'il avait faites. Il lui avait juré de toujours la protéger et souvent en cours de missions, alors qu'elle se trouvait dans des situations inextricables, une solution était apparue comme par magie. Il aurait pu et à juste titre, prendre la tangente mais il ne l'avait pas fait. Lucas avait une morale propre qui lui interdisait de reprendre la parole donnée. Quand Tom lui avait fait promettre de prendre soin de sa famille comme si elle avait été la sienne, il avait accepté et leur avait rendu la vie plus facile mais toujours en restant dans l'ombre. Et puis, un jour, elle l'avait retrouvé devant sa porte. Il n'avait pas été tendre avec elle, l'accusant d'être une mauvaise mère, indigne d'un petit garçon comme Louis. Il lui avait rappelé le petit Ange, cet enfant qu'ils avaient l'un et l'autre tellement désiré et que par orgueil ou préjugés, il avait tué. Ce même enfant que lui n'aurait plus jamais. Il avait, alors, emmené toute la famille en Sicile où à force de menaces ou de gentillesse, il l'avait peu à peu sortie de son désespoir.
A aucun moment, il n'avait eu de geste déplacé envers elle. Passionnément amoureux, il lui avait tout simplement redonné le goût de vivre sans rien attendre en retour. C'est elle qui avait pris l'initiative de leurs retrouvailles. Cela n'avait pas été facile, il avait, d'abord, fait la sourde oreilles à ses avances. Il voulait qu'elle soit sûre de ses sentiments. Il voulait son amour pas sa gratitude. Et enfin, un soir, un peu plus de deux après la mort de Tom, ils s'étaient retrouvés. Leur étreinte n'avait plus le goût des débuts. Ils n'étaient plus avides de se découvrir. Ils voulaient juste s'aimer. Peu à peu, elle était revenue aux affaires. L'ancien flic d'Interpol était devenu une très puissante femme d'affaire à la tête d'un empire financier ou du moins de sa façade légale. Par égard pour Maggie et Louis, elle ne voulait plus tremper dans les coups tordus du clan.
-On rentre ?
- Je crois oui. Merci Lucas
- Pourquoi ?
- N'avoir jamais essayé d'effacer Tom

Sans un mot, il lui prit la main qu'il baisa et l'entraîna vers al voiture. Au loin, les policiers en faction autours de la tombe attendaient un signe de leur chef pour passer à l'action et appréhender les deux têtes pensantes du clan Paoli. Mais le signal ne vint pas. Rocca, le regard sur la tombe de Tom Macfadyen, sensible à la détresse de la jeune femme, ne donna pas l'ordre qui l'aurait une fois de plus séparé d'un mari et un père.